Pourquoi l'organisme porte-parole réclamait-il un pouvoir exécutoire
pour Graham Fraser quand ce dernier n'a pas adéquatement utilisé son
pouvoir moral?
Suite à un constat troublant
des résultats de 40 ans de régime de langues officielles, la Fédération
des communautés francophones et acadiennes (FCFA) réclamait récemment
un pouvoir exécutoire pour Graham Fraser, le Commissaire aux langues
officielles. Selon l'organisme porte-parole des francophones vivants en
milieu minoritaire, un tel pouvoir faciliterait la mise-en-œuvre de la
loi canadienne pour lequel 300 millions de $ sont pourtant déjà alloués
annuellement.
A en juger par l'apathie qui a suivi cette recommandation dans tous les
médias canadiens, réclamer plus qu'un pouvoir exécutoire serait
vraisemblablement nécessaire en l'absence de volonté politique. Et
mobiliser l'opinion publique semble vital s'il faut changer la volonté
politique plutôt frileuse en ces temps de compressions de l'économie.
Mais compte-tenu des résultats d'apathie des quarante dernières années,
peut-on se demander si les Commissaires aux langues officielles ont été
suffisamment dynamiques pour secouer les canadiens de leur léthargie
sur le sujet au-delà des groupes d'intérêt habituels qui ont sabordé
tous les budgets? Les pavés de rapports annuels, études à n'en plus
finir et autres comparutions devant des instances institutionnelles ont
vraisemblablement alimenté cette apathie terminale et désengagé
l'opinion publique.
Notons que malgré des changements fondamentaux ces dernières années
dans nos moyens de communication, Graham Fraser ne blogue ou ne
gazouille (aka Twitter) toujours pas. Plusieurs collègues lui ont
pourtant bien montré l'exemple dans d'autres sphères institutionnelles,
sinon communautaires et citoyennes. Non seulement ne maintient-t'il
aucune présence dans les médias sociaux capables de mobiliser, mais il
n'a jamais dénoncé la couverture médiatique frileuse du diffuseur
public en matière de langues officielles. Que ce soit le
dysfonctionnement du maintien de ghettos linguistiques à travers CBC et
Radio-Canada incapables d'intéresser les Canadiens aux langues
officielles, l'incapacité de tenir les tribunes publiques nécessaires
pour rendre cette loi plus pertinente, ou encore de dénoncer la
consultation dite publique sur la dualité linguistique tenue sous
huis-clos par Bernard Lord. Certains se rappelleront que seulement une
centaine de canadiens et de groupes d'intérêt y participaient il y a
deux ans, quelques mois seulement après l'épisode des accommodements
raisonnables. Cette consultation québécoise avait alors suscité un
intérêt énorme parmi les médias et les citoyens à travers tout le
Canada, cela malgré des impacts minimum sur les finances publiques.
Depuis qu'il est en poste, Graham Fraser a constamment ménagé la chèvre
et le chou. La confrérie journalistique à laquelle il appartient
l'empêcherait-il de voir clair et de bien agir? Si le Commissaire aux
langues officielles n'a pas adéquatement utilisé le pouvoir moral dont
il dispose, pourquoi alors lui réclamer un pouvoir exécutoire? La
démission semble plutôt de mise et la FCFA aurait intérêt à mener son
propre examen de conscience si elle désire demeurer pertinente en ces
temps de grande frilosité. Tiens, tiens, "apposer des X" sur les
communautés francophones en milieu minoritaire, ou ce qui en reste: qui
ne dit mot ne consent-il pas?
Le Canard des Langues Officielles
"La cigale ayant chanté tout l'été se trouva fort dépourvu quand la bise fut venue"
Jean de la Fontaine